Le 1^er novembre 1975, je suis entré à TF1 comme petit reporter au service politique. Un été, il y a eu une place au J.T. pour cause de vacances, c'est aussi bête que ça. J'étais un de ceux qui étaient en situation d'assurer l'interim.

Non , ce n'est pas mauvais. Quand on fait le total des audiences entre 20h et 20h30, on s'aperçoit que les trois quarts des personnes regardent au moins un journal télévisé. J'aime bien la comparaison avec le restaurant, l'essentiel est la cuisine. Nous on est un peu les maîtres d'hôtel. On est là, en salle avec le smoking, la cravate. Si on est sympa, souriant et décontracté et que l'on vend bien le menu, tant mieux. Mais encore une fois, on ne va pas au resto pour la gueule du maître d'hôtel. L'important c'est la cuisine ! A nous d'offrir des reportages précis, honnêtes, variés, intelligents, imaginatifs.

TF1 n'était pas le bagne, juste des problèmes relationnels avec la direction. Globalement, je sclérosais à TF1. J'aurais pu continuer pendant 20 ans le JT du week-end. Quand on sort et qu'il pleut, c'est que l'on a besoin de sortir. Il était temps que je sorte de mon fauteuil pour me balader.

Je ne raisonne pas comme ça. Mon action n'était pas mercenaire, mais délibérée. J'ai perdu un bon quart de mon salaire. Je faisais la démarche de venir au service public, la cohérence est de mise. On travaille en collectivité, psychologiquement c'est impossible d'avoir un écart de salaire trop important avec vos collaborateurs. Je suis certes un privilégié, mais je trouve anormal qu'un présentateur de TV soit payé dix fois plus qu'une infirmière.

Pfff … (Rires !) Je vais dire des banalités. C'est un modèle de stabilité. A mes yeux les Suisses ont une qualité essentielle : ce sont des gens sérieux. J'en suis à mon troisième livre, je fais très bien la différence entre les journalistes français qui à 80% n'ont pas lu mes livres. Quand on est auteur, on le sent tout de suite. Mon expérience avec mes confrères suisses en radio, presse écrite, ont toujours été très agréables car on n'avait un vrai dialogue. Ils posaient des questions qui montraient qu'ils allaient au-delà des dix premières pages, qu'on a lues en vitesse avant que l'auteur entre en studio pour être interviewé. Les journalistes français, y compris moi-même, nous manquons de rigueur. Voilà, c'était ma minute de démagogie.

C'est souvent perturbant quand les gens vous déversent un tombereau de gentilesse. Mis à part dire merci, que voulez-vous dire ? Je préfère à la rigueur que l'on m'interroge sur mon JT. Pourquoi vous avez fait ça ? Là, le dialogue s'engage.

Moi, j'aime pas du tout, c'est très laid, surtout les couleurs. A2 a de véritables problèmes d'argent. Le budget consenti pour le logo aurait pu servir à acheter du matériel, augmenter les salaires car il y a des gens, ici, qui sont mal payés. Au lieu de donner beaucoup d'argent à une agence de pub. On aurait pu faire un concours interne à A2 car il y a de très bons graphistes. Je suis persuadé qu'on aurait mieux fait en "sloguant" deux heures de déconnade autour d'une bouteille de beaujolais. Cela dit le logo de TF1 est aussi moche.

J'ai passé le mur dans ma tête, si ça s'arrête, je m'en fous, il faut savoir laisser la place aux jeunes.

Mon hygiène mentale, c'est l'écriture. C'est un défouloir où l'on est responsable de son travail. Alors qu'en tant que présentateur, je ne maîtrise que 20% du journal.